Le caractère particulier du processus créatif chez Antonio Canova tient aux modèles en plâtre grandeur nature qui constituaient une transition entre la phase initiale de la conception et la réalisation proprement dite de la sculpture en marbre. Comme l’explique le photographe Luigi Spina, « […] le plâtre est dans l’acte de conception de l’artiste, le moment fragile et variable où le corps de la sculpture est senti. » Œuvres non encore finies, les plâtres ne contiennent pas moins toute la force et les potentialités de la sculpture achevée. Les petits clous en bronze (repères) guident le photographe en dessinant un atlas visuel totalement inédit, et permettent au lecteur de se perdre dans des parcours tout aussi inédits, entre expressions et gestes, coiffures et plis des drapés.
Les séquences photographiques réalisées au contact de l’œuvre sculptée en dévoilent les surfaces de plâtre et permettent au regard du lecteur d’approfondir – une fois encore – le lien entre lumière et plasticité de la matière qui constitue l’un des aspects essentiels et particuliers de l’œuvre de Luigi Spina.
Enfin, comme l’annonce le sous-titre, la dimension temporelle est l’un des éléments clefs de la recherche photographique menée par Spina, dans la solitude, parmi les salles de la gypsothèque de Possagno. Ces « quatre temps » ne veulent pas être un simple expédient pour décliner la réflexion visuelle du photographe durant les quatre années des commémorations canoviennes (2019-2022). La dimension temporelle possède une importance sans égale dans la phase de création et de réalisation du sculpteur néo-classique : il y a un avant et un après l’œuvre en plâtre. L’avant correspond à l’étude préparatoire ; l’après à l’œuvre achevée. Le plâtre occupe une place centrale, entre les deux. Ce volume entend présenter au grand public cette phase si riche de sens et, dans le même temps, si peu connue du travail d’Antonio Canova, l’un des plus grands sculpteurs de tous les temps.
Luigi Spina est photographe. Son oeuvre s’articule autour des amphithéâtres et du sens civique du sacré, des liens entre l’art et la foi, de la recherche d’identités culturelles anciennes, de la confrontation physique avec la sculpture classique. Chez 5 Continents Editions il a publié The Buchner Boxes, Hemba et Des jours et des mythes. Il anime avec Valeria Sampaolo la collection « Oggetti rari e preziosi al Museo Archeologico Nazionale di Napoli », qui compte à ce jour les titres Memorie del Vaso blu, Amazzonomachia, Centauri, Zefiro e Clori, Sette sapienti et Satiro ebbro. Grâce à La Tasse Farnèse, il a en outre ouvert la série « Trésors cachés ». Enfin, chez le même éditeur, il a publié, dans la série Tailormade, Les Danseuses de la villa des Papyrus.
Vittorio Sgarbi est critique d’art, commissaire de grandes expositions internationales, collectionneur raffiné et auteur d’ouvrages de vulgarisation tous centrés sur l’importance de la culture et de l’art. Parmi ses dernières publications, citons Dall’ombra alla luce. Da Caravaggio a Tiepolo et Dal mito alla favola bella. Da Canaletto a Boldini, dans la série « Il Tesoro d’Italia ». Il estégalement homme politique et se définit comme un libre penseur indépendant.